Ion STRATAN   
 


       

 


QUELLES CHOSES

Quelles choses importantes dit ce poète-là
– Nous hachons des oeillets pour la salade

Il est bien d’être à côté de l’histoire
de voir le visage des Majestés

quelles choses importantes dit ce poète-là
– on s’ébranle dans la barque de mousse
sur le lac de café

la mer s’évanouit seulement dans la vue
 

CEUX QUI VONT À LA MER
        Au poète Marian Ruscu
Ceux qui vont à la mer
rencontrent ceux qui en voiture
vont à la montagne

ceux qui vont à la mer sont
blancs ostensiblement et mangent
des centaines de crevettes au kilo

Ils arriveront et baiseront le sable
ils arriveront et baiseront l’eau

et ils oublieront d’avoir passé à côté
de ceux qui vont à la montagne poussés dans
la clairière
pareils à l’Aphrodite dans l’écume de la mer

LE SILENCE D’ENTRE LES COULEURS
si le rouge crie,
si le bleu se tait,
griffonne un silence
entre elles,
une maison bleue délabrée,
un montée de la mer,
un papillon dératisé,
un bête d’encre,
un bâillon de jaune

MOT FUSILLÉ DANS  LA NUQUE
jusqu’à la fin il n’a voulu dire rien
ce mot emprisonné pour les beaux yeux
de la guerre
ainsi que les enemis l’ont fusillé
dans la nuque
ils détestaient le langage, ils haïssaient
le sens
du mot aveugle auquel ils n’ont pas
couvert les yeux
pour le fusiller dans la nuque.

CONCOURS
    A Letitzia
si je te demandais pour mille lei faux
ce que c’est la vie
tu me montrerais un bras cyclamen
si je te demandais (pour une moto à vapeur)
ce que c’est le temps
tu peindrais les vitres avec le cil
si je te demandais pour un pressoir
d’oeil
ce que c’est le mot
tu m’apporterais une tasse d’ongles

LA ROUE FUNÉRAIRE
je voudrais que vous me montiez une roue
au chevet de la colline
où vous allez m’enterrer

une roue pour voir avec des boutons
de nacre qui trouent l’éclat
de l’étoile

une roue pour la course d’arbre
en arbre
nommée saison

LA DERNIÈRE ANNONCIATION
et si l’avenir est une vitre enfumée
par les résidus du soleil à midi

et si tout ce que nous vivons
est un hachis de rayon

et si tout ce qu’a été est une alarme
de la beauté en explosion

que je ramasse les éclats, que je polisse
le vase

en l’honneur des fleurs

de je ne sais pas

UN LEVER DE SOLEIL EN OCCIDENT
obsessions d’un instant
tant de regret – les magasins verts
formés pour la réorganisation

de la petite localité montagneuse

les doigts du regard battent la mesure sur la vitre
l’odeur des ongles griffe la dorure,
l’ouïe arrache des grelots bouchés
des magasins verts

voilà Arthur avec une chope
en remplissant les vitrines en papier d’étain

à minuit passé


Traduceri  de Ion ROSIORU


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