POEME ROMÂNESTI ÎN LIMBI STRĂINE

Radu STANCA



 

 

 

Lamentation de Jeanne d’Arc sur le bûcher
à  Monsieur Henri Jacquier

 

Pour le début les flammes embrasseront
Mes pieds blessés et puis encore mon cou
Et affamés serpents du talon
Détruiront d’un son brisé ma joue.

Mais moi, je resterais sur le bûcher
Comme sur les murs, tout droite, pas abattue,
Ni d’anathème je n’en jetterai jamais
Ni de grîce sainte, pas du tout.

Sans larmes, comme un homme banal,
Sous les humides tempes, j’attendrai
Que tout le vent se change en raffale
Et ce qui m’est prédi doit se passer.

Car c’est la première fois de ma vie
Aussi la dernière peut-être c’est
Quand l’on m’embrasse quelqu’on aujourd’hui
En m’enseignant une fille d’être’en secret.

Comme une petite verge il me serre en bras
Une fleure en feu me fait et il m’encline
Mes lèvres bien timides aussi il boit
En abaissant mon tronc de l’origine.

Jettant sa face en haut me casse par dents
Il monte sur mes hanches, il tombe sur cuisses brisé,
En dénattés cheveux par des serpents brûlants
Cents langues soudain il va les mélanger.

Et quand couvrant mes paupières en cendres
Dans un étrange embrassement fort accompli
Comme dans une haute amphore bien fumante
En me baignant me donne de l’envie

Que sur l’bûcher trop plein en bras ardents
Je jette mes bottes, je danse à peu près
Le jeu païen d’amour, abandonnant
Le haussement de la prière accoutumée!

Et maintenant au moin je vois au fond
Vers langues qui s’empressent et qui m’attirent
Que moi – la pauvre – j’ai un très bon tronc
Et une taille zvelte comme la flamme pure

Et que mes doigts sont aussi menus
Et mes seins ronds sont blancs comme agnelets
Que j’ai gardé quand j’ai rêvé armures
En attardant en caisse le jeu de cléf.

Oh! J’ai pas su que c’est meilleur au monde
Et d’autres choses que d’recevoir blessure
Dans une bataille quand à pied ils tombent
Et cassent la couronne: chevaux, armures

Quand brûlent les drapeaux et quand scellés
Avec pleines portes se brisent et laissent dans la cour
Tourmente sombre de cavaliers
Qui portent des armes longues, habits courts.

J’étais trop fière, mon Dieu, encore beaucoup
Je suis restée sous le ciel libr’en écoutant
Comme ennemis se heurtent en visières partout
Au lieu de faire en jeu passer mes ans

Et au lieu d’agir comme chaque fille
Qui peigne ses beaux cheveux en me pressant
J’ai les laissé en leur sauvagerie
En heaumes j’ai les fermé négligement.

Avide de bataille et de vent
Sur ma poitrine de fille déraisonnable
Et en faisant l’obscure engagement
J’ai bien serré l’armure pas raisonnable.

Voilà ma faute: je n’ai pas laissé
Jeunes hommes d’esprit caché devant la porte
Et quand aujourd’hui un homme m’a bien serré
Je suis déja prédestinée à une belle mort.

Malheur à moi, la pauvre – je sais aujourd’hui
Lequel aurait été l’usage d’ ma main
Où j’ai mis le poignard rempli par des débris
Au lieu d’y mettre en trilles la pîte du pain.

Malheur à moi, la pauvre, je pleure aujourd’hui
En regrettant d’ mourir ensorcelée
Avec les blanches flammes je me marie
Et sans remords, j’accepte d’être hachée.

Pourtant les flammes augmenteront sans trêve,
Et grandira aussi l’étrange orgie
Et tout de suite mon bien-aimé avide
Mon premier amant, sans qu’il saisit

M’enfermera en lui énormement
Car ne pourra-t-il séparer
Mon tronc du sien en anneau blanc
Il va m’aimer comme bruillard mort et mince fumée.

(cf. Revista cercului literar, ianuarie 1945, Redactor: Ion Negoitescu, Sibiu, ianuarie 1945, apud  Revista cercului literar, Restituire integrală a publicatiei, editie îngrijită de Dan Damaschin;Prefată de Petru Poantă; Ed. Dacia, 2002, pag. 9-11)

Version française: Claudia PINTESCU

 

 

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