POEME ROMÂNESTI ÎN LIMBI STRAINE

   

Vasile PROCA

 

La peau sentant la lumière

 

– Cette journée este plus longue que le géant animal se rampant

la peau sentant la lumière: je me l'imaginais

grisonnante cherches-tu quelque chose dans la lumière?

il faut dire des mots même ébréchés sur

les chemins qui mènent vers les péchés de la chair lorsque

la nuit sent la nuit la femme longtemps

rêvée: tu visionnes mes rêves tandis que je chasse

ton corps hissé comme cerf-volant au-dessus de toutes

les créatures de cette terre

 

… dansaient autour de moi les ombres de ceux qui sont partis

pour cueillir des éclaires: je ne veux pas de corps

d'éclairs je prends mon sommeil et je le jette dans la fontaine

et la fontaine sent l'eau dont on boit pour la huitième fois

 

… Et c'est comme ça qu'on revient un peu à la réalité: afin de

prendre le cercueil sur le glacier qui flotte

par nos veines emporté par le vent sentant

le vent: on inaugure encore une vie on boit de la vodka

on laisse des traces dans les chansons on dépasse la ligne

de l'horizon on rit avec amertume on cueillit des voix

et on joue à l'accouchement du bébé saint dans cette journée

plus longue que le géant animal

 

Un jour sans nom

 

– Tu es le brigand qui a ouvert le paradis

un jour sans nom:

 

… te pense la femme-terre

et la terre est insensée de grillons

un jour aveugle

 

… tu regardes lorsque tu ne regardes pas la femme de l'eau

lever timidement les jours de l'homme

c'est le temps du lit c'est le temps du lit

 

… ô la femme de souvenir en nageant

par son sang la nuit comme fait dormir ses heures

en les ramassant

un jour sans nom

Les nuits

 

– Tombent les nuits – l'une après l'autre tombent terriblement

sur moi: les nuits ma bien-aimée me hantent lorsque tu lie

aux cartes l'homme de vert: tu l'entends jurer qu'il perce

la Nuit de cette écaille-là afin de t'offrir le perle

de l'amour

tombent les nuits: dans la langue des nuits je lui parle Seigneur

tombent les nuits: avec les yeux et la bouche je bois bleu ses seins

 

… chaque jour tout plein d'elle je m'entends demander:

seule cette femme pourrait être un aujourd'hui et un demain?

Les nuits les nuits les nuits en courant à travers nous

 

… prends plutôt la forme de l'indifférence et ne reviens plus

là où tu as vu ton coeur brûler aux grands feux

la tristesse m'ordonne: et j'appele la tristesse

sur son nom

 

… et pardonne-moi Seigneur de m'avoir vu
tomber dans cette femme…

 

… et pardonne-moi de me voir chaque fois

aux portails des monastères en attendant à ce que tu reviennes

avec ma mariée par des paradis en marchant

 

 

J'entends le son homme

 

– Dans l'air respiré je prie:

je vais appeler ton corps femme: herbe sanctifiée

est ma caresse

et ton corps dit: que tu me boives le soir et ressuscites

ta foudre mon homme à moi

 

… Dans le baiser dernier je prie:

je vais m'étendre sur ton corps tremblant: reçois

que j'ouvre son secret: moi rayon toi éthère

et ton corps dit: je vais te fermer joyeusement dans

le silence de ma chair mon homme à moi et foudre à la fois

 

… dans l'accouplement je prie:

comme ça pour la vibration des corps comme deux

clavecins lorsque tombe le soir disaient: au loin au loin

on entend le son homme se cogner contre la Mort

 

Au autre silence

 

– Sauve-toi avec encore une douleur

homme qui marches sur les traces de la peine

 

un silence: dans le cerveau de la nuit dernière

avec difficulté paralaient

l'eau la forêt et le troupeau de fauves:

sept étaient les épreuves et les chasses toutes sept

… un autre silence: de nouveau la balle se rêvait blessure:

le sand était la croix portée d'un éclat

sept étaient les jours et tous étaient fêtes

 

 

L'air vert

 

– Elle t'aime vraiment – dit le bacillaire

en comptant les sangliers du champ de mas

 

… Je t'ai vue aujourd'hui courir nue

parmi mes morts alignées pareilles aux falots

dans la rue principale

 

 

avec des nuits je t'embrasse tu me pardonne avec des matins

 

… je laisse le sang siffler jusqu'à ce qu'il réveille l'air

vert du triangle des grues cendrées:

septentrion échevelé j'ai rêvé de toi ma chérie

 

… même aujourd'hui je t'ai vue courir nue

parmi mes morts alignées pareilles aux mendiants

dans la rue principale

 

 

Edit

 

– moi, celui qui a perdu la tête: je montre ces mots parus

sur mon corps pareil à un poème

d'une érotique céleste je demande qu'ils soient lus

par la bouche de la femme

où je vais mourir

 


Le jour où viennent les serpents

 

– C'est le Grand Jour où viennen les serpents:

comme les mendigots ils se traînent jusqu' à ce qu'ils inondent l'église

en touchant légèrement les icônes et les pèlerins

qui prient tenant des vases de glaise dans leurs mains:

Grand Seigneur Fort Seigneur donne-moi de l'incantation du serpent…

 

… mets-toi quelque chose en tête

et mets ton silence comme couche pour tous les corps

devenus forêt d'os sous le pouvoir du frémissement

du sang effrayé

 

… ô le fouet des serpents phosphorescents en peignant des vitraux:

et lundi et mardi et mercredi et jeudi et vendredi et samedi

et le dimanche on entend prier également les saints des icônes:

donne leur de l'incantation de chez le serpent et mène-les vivants

plus loin…

 

… c'est ici sur les lieux le jour quand autour de la fontaine

du milieu de l'église on attend aux vases de glaise dans les mains

et les serpents à voix humaine crient:

donne-leur de l'eau Ghérassime donne-leur de l'eau Ghérassime

et la fontaine se remplit de l'eau potable

 

… je mourrai le jour où les cheveux de la bien-aimée nid

de serpents seront et la révolte du corps désiré

me serrera comme des tenailles

 

 

L'oiseau de la mort

 

•  Un signe seulement par toi connu ferme ce vers

 

… une main serre ses doigts pour faire le signe de la croix

et ferme

dans le poing l'air vivant qui se débat comme un petit

de moineau qui a picoré La Mort et qui s'est transformé

dans l'oiseau de la Mort

 

oiseau: à ta bouche il y a la langue du temps et

réjouis-toi de pouvoir parler à la mort –

c'est pareillement que la langue des cloches oignent

avec des saintes huiles le front

des passants

oiseau: on a dans le corps les ailes de corbeau du désert

et réjouis-toi que chaque jour il a nourri avec des morceaux

de pain l'homme saint

 

une main serre ses doigts comme un signe seulement par toi

connu et termine maintenant le poème

 

 

Saisons

 

(poème en quatre parts)

MOTTO:

„… approche tes seins de mon visage je suis en agonie et je me

tais avec langue de mort…”

Gellu Naum

I

– Qui te laisse non atteint comme la neige immaculée

maintenant qu'en toi grandit provocante la Mort

demande l'année sans hiver

 

… il y a encore un immense janvier

et de son coeur qui guette dans les gens

qui vole

d'où les yeux vides augment la torture blanche

et qui dans sa bouche ramassent les hurlements de la nuit

et ne craint pas

 

Du tableau s'en va le rêve peint par les insomnies

Lorsqu'il sent sa nudité embrassée par la mort

 

II

– Durant l'année sans printemps surveillée de foudres

Avril a oublié de venir:

et le regard lui rumine ses levers de soleil

et la nuit le remplit avec les maladies de l'imagination

et la cendre où brûle la déesse de glaise dit comme ça:

dehors il y a

un enfant géant

caché dans une goutte
de rosée et fait des charmes:

 

… sors de ton corps et épie un dieu

sors de ton oeil coin de ciel

sors de la larme nom d'homme

et avec lui noie la terre avec des illusions

et regarde par une prière avec un regard obscène

d'asphalte surchauffé lorsqu'il pleut d'une façon étonnée:

se secoueront les serpents de la Mort

qui a fleuri

 

III

– Durant l'année sans été ma vie de jasmin

de deux nuits et deux seins bâtit une prison

pour toi fou roi soleil:

 

… viens et pour la septième fois sors-moi de la foudre

et jette-moi sur des herbes étourdies
et jette-moi sur des herbes guéries

afin que je me réveille nommé eau

par ma bien-aimée montée dans le ciel de foin affammée d'accouplement:

 

… que nous respirions un rituel païen

dans les secrets de la nuit bouillis petit à petit

le corps en désordre d'étoiles et d'amen:

aux yeux nous avons deux nuages qui nous confondent avec deux

chandelles par lesquelles nous entrerons dans un autre lundi

emportés par des oiseaux migrateurs venus estiver

dans l'infinie Mort:

 

nous sommes de douleur et nous sommes de solitude

 

IV

– Toujours sont jaunes en l'air les draps immaculés

toujours est rouge son sexe de malheureuse vierge durant

l'année sans automne et moi vagabond à travers

ma propre Mort

 

… les jambes distancées Octobria

se cambre se lève se débat

et se tait en moi là dans le champ où ont poussé

nos jours et nos nuits

 

… le corps couleur du pain elle respire du feu et moi

je me ta is en elle pareil au pépin dans le fruit comme si

tout ce qui nous entoure était un utérus géant de copeaux

de soleil

 

… nous restons dans une extrase continue et nous ne nous rendons pas compte

qu'entre nous il y a seulement l'écho avec lequel nous répond

le silence bleu des cieux alcooliques

En français par Ion ROSIORU

 

 

 

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