POEME ROMÂNESTI ÎN LIMBI STRĂINE
Mihai EMINESCU
De l’étranger
Quand tout bien réjouit, quand tous ici s’enchantent,
                Quand tous ont leur plaisir, leurs jours sans de soicis,
                Ce n’est qu’une âme qui pleure, dans son désir s’élance
                Vers les champs souriants, les plaines de ma patrie.
Et ce cœur-là qui gémit en souffrance,
                Et aussi cette âme qui chante engourdie,
                C’est mon triste cœur qui n’a pas de caresse,
                C’est mon âme qui brûle d’un désir infini.
J’aurais envie de voir ma natale vallée
                Baignée dans le cristal d’un beau ruisseau d’argent,
                Voir ce que jadis j’ai tellement aimé:
                Les ténèbres du bois, poétique labyrinthe;
Que je salue une fois les chaumes de la vallée
                Dormantes  avec un  air de paix, d’apaisement,
                Qui respiraient en cachette des plaisirs plus vrais,
                Des rêves mystérieux, lyriques chuchotements.
J’aurais envie d’avoir une calme hutte, petite,
                Dans ma natale vallée qui ondoyait en fleurs,
                Pour que je dévisage le mont qui tout en haut se lève,
                Anéantir son front en nues et en vapeurs.
Que je regarde encore la plaine embellie
                Qui a tissé mes jours   blanchâtres, de l’enfance,
                Et qui une fois mon jeune murmure elle a ouï,
                Aussi voyant mes bonds, les jeux de mon bas-âge.
L’harmonieux murmure d’une ruisseau qui gémisse,
                Le concert entonné par le chœur des oiseaux,
                Le chant en cadence des feuilles, qui frémisse,
                Ont jailli en moi des chuchotements désireux.
Oui ! Oui ! Comme je serais heureux si j’étais à nouveau
                Dans mon aimée patrie, dans mon endroit natal,
                Que je puisse   exprimer de mon bon sens très chaud
                Les rêves de la jeunesse, les rêves d’un idéal.
                Et même la mort qui la terreur répand
                Et les frissons glacials dans ses veines vibrantes,
                Là-bas va m’endormir en douce apaisement
                Vers nues va me traîner en illusions plaisantes.
  Familia, 17/29 iulie 1866              
Sur les cimes
Sur les cimes glisse la lune,
                Le feuillage frappe doucement,
                A travers les branches d’aulnes
                Le cor sonne tristement.
Plus loin, plus éloigné,
                Lentement, plus lentement,
                Et mon âme pas consolé
                D’un goût de mort l’adoussant.
Pourquoi tu tais quand bien charmé
                Mon cœur ravi tourne vers toi ?
                Tendre cor vas-tu sonner
                N’est que pour moi encor une fois ?
  (Editia 1 Maiorescu, dec. 1883)
Traduction: Coca SOROCEANU